Saint Jean de Valaam

 

SUR L'HUMILITÉ

Par Saint Jean de Valaam

 

Bien que tu sois libérée des passions, garde l’humilité et , jusqu’à mort, ne te fie pas à toi-même. Nous devons peiner pour chaque vertu, mais le succès de nos efforts dépend de la grâce divine. C’est en réponse à l’humilité, et non à l’ascèse, que Dieu accorde sa grâce. Plus l’homme s’humilie, plus la grâce le visite. Je te conseille de lire les cinq discours sur la pureté du cœur de saint Macaire le Grand. (Chapitre 3 - 27 avril, 1940)



L’orgueil est pire que tout; c’est par lui que le diable a perdu sa luminosité première pour devenir ténèbres. Mon enfant aspire à l’humilité et, jusqu’à ta mort, ne te fie pas à toi-même! Il n’est pas en notre pouvoir de persévérer dans les vertus; c’est l’œuvre de la grâce, qu’on ne peut conserver que par l’humilité. Saint Jean Climaque dit: «Là où une chute est survenue, l’orgueil a précédé».       Certes, il serait bon de cheminer dans la vie spirituelle sous la direction d’un père spirituel; il est très dangereux de se guider uniquement par les livres. C’est comme si une personne n’ayant pas étudié la médecine prenait à la pharmacie un poison au lieu des médicaments appropriés.(…..), posons l’humilité du publicain comme fondement de notre édifice spirituel et, dans sa bonté, le Seigneur nous aidera, pécheurs que nous sommes, à éviter les embûches sur notre chemin. Dans nos faiblesses, repentons-nous, car tous les pieux ascètes se sont cramponnés à l’humilité et au repentir.   (Chapitre 17 - 21 février, 1947)


…….quelques soient les passions que tu décèles en toi, lutte contre elles, et cela, non seulement avec tes propres forces, mais avec l’aide de Dieu.…Sache encore que si les efforts sont nôtres, le succès, lui, dépend de la grâce. Et c’est en réponse à l’humilité, et non à l’ascèse, que la grâce nous est donnée. Plus un homme s’humilie, plus la grâce le visite.    (Chapitre 29 – 1947)

(Le Sauveur) a souffert l’opprobre, les accusations, les crachats, les soufflets, les coups sur la tête et la mort infâmante sur la croix. Pardonne-nous, Seigneur, pour notre négligence et notre indifférence à tes souffrances! Qu’en est-il, en effet, de nous? A peine nous a-t-on adressé un reproche que nous nous froissons. Cela prouve que nous n’avons pas d’humilité, mais de l’orgueil. Et sans humilité, point de salut: nos exploits ascétiques seront vains. Comme nous l’enseignent les saints Pères, c’est en réponse à l’humilité, et non aux labeurs ascétiques, que le Seigneur accorde ses dons. Dans les épreuves, il faut lire le Saint Evangile et les écrits des saints Pères.  (Chapitre 54 – 2 mai, 1951 )

Un moine m’a dit l’autre jour: «J’en ai assez de vivre! Si je pouvais mourir au plus tôt et me dissoudre dans le néant!» J’ai gardé le silence. Je sais qu’il n’accueillera pas mes conseils. De fait, tous les moines ont lu des masses de livres; chacun comprend la théologie et l’enseignement des saints Pères à sa façon, correcte ou non, et s’accroche à ses convictions. Les conseils des saints Pères ne conviennent pas à ce genre de personnes, qui aiment enseigner aux autres! Comme l’a bien dit le saint Abba Dorothée: «Chacun vit dans la négligence et n’observe aucune vertu, mais exige du prochain l’accomplissement des commandements». Combien d’exemples de cette attitude rencontrons-nous dans une journée! Personnellement, je n’y fais pas attention, car il s’agit pour ainsi dire d’un phénomène ordinaire. Si nous nous observons nous-mêmes, nous verrons le chaos qui règne dans notre cœur, tout simplement, de telles attitudes ne nous toucheront plus.  ( Chapitre 65 – 17 septembre, 1952 )

Aussi, ne cherchons pas à savoir quelle croix le Seigneur donnera à l’un ou à l’autre. Si une personne nous dénigre et nous bafoue, ne nous troublons pas et ne la condamnons pas, mais prions que le Seigneur l’aide et la délivre de ses malheurs et tourments. Sache que pour désagréable que cela soit, il nous est très utile et salutaire d’être dénigrés et humiliés. Observe-toi plus sévèrement et tu es feras l’expérience. Il faut redouter les louanges, car elles nourrissent la vanité et la présomption. Malheur à nous, si la louange dépasse nos œuvres.  ( Chapitre 66 – 4 décembre, 1952 )

J’ajouterai encore ceci: redoute beaucoup la présomption de croire que tu as reçu quelque chose d’élevé que les autres ne connaissent pas. Des ascètes ont été ravis dans l’autre monde et ont vu la gloire des saints; on les a loués, ils s’en sont laissé accroire et l’orgueil diabolique s’est emparé d’eux; ils sont alors tombés de leur hauteur spirituelle et ont mené une vie de débauche, devenant la risée des hommes  ( Chapitre 74 – 12 mars, 1954 )

Moi aussi je suis de nature paresseux, sans volonté et timide, mais je ne pense pas, comme toi, que c’est un «châtiment de Dieu». Cela nous est utile: cela engendre l’humilité. Il faut beaucoup redouter l’orgueil, la présomption et la vanité. Les saints, eux non plus, n’ont pas été exempts de telles passions désagréables t et afflictions. C’est que notre vie est semblable à une petite embarcation sur la mer. Il nous faut dès lors supporter toutes les intempéries: il ne peut en être autrement. ( Chapitre 75 – 11 mars, 1953 )

Tu connaîtras parfois la sécheresse, la paresse (la prière), l’afflux des pensées, des afflictions, des calomnies venant des hommes et beaucoup d’autres choses; mais, avec l’aide de Dieu, tout cela passera. Simplement, ne te décourage pas. Ne te fie pas à toi-même jusqu’à la mort. Garde l’humilité et ne condamne personne en quoi que ce soit. Des ascètes ont vu la gloire des saints et reçu une telle grâce de Dieu qu’ils accomplissaient des miracles, guérissaient des malades en leur imposant les mains. Mais, victimes de l’orgueil diabolique et de la louange des hommes, ils ont présumé d’eux-mêmes. La grâce s’est retirée d’eux et ils ont mené une vie de débauche devenant la risée des hommes. 
Ne t’étonne pas de sentir les passions en toi. Elles nous rappellent que nous sommes des hommes et nous humilient. Redoute la présomption et l’orgueil diabolique. Sache encore qu’il ne dépend pas de nous, mais de la grâce de Dieu, de persévérer dans les vertus et que c’est par l’humilité  qu’on les conserve. Saint Isaac le Syrien a dit: «Si tu te donnes de la peine pour pratiquer une vertu, et que tu ne vois ni profit ni progrès, ne t’en étonne pas, car c’est en réponse à l’humilité et non à l’ascèse que le Seigneur accorde ses dons».
Sans humilité, il ne peut y avoir aucune vertu. ( Chapitre 78 – 6 février, 1954 )

La véritable humilité doit aller jusqu’à se considérer, en pleine conscience et au fond du cœur, comme pire que tout homme et que tout animal sur terre. Les saints Pères ont dit: «l’humilité est divine, elle a incliné les cieux et est descendue sur terre. Elle s’est incarnée et le Dieu-homme est venu».  ( Chapitre 95 – 18 janvier, 1958 )

 Extraits de : Béatitudes - Lettres d’un moine aux enfants de ce monde
(Ed Le sel de la terre)